
À l’affiche le 21 mars, Jouer avec le feu, troisième long métrage des sœurs Delphine et Muriel Coulin (17 filles, Voir du pays), aborde un thème qui n’a jamais autant résonné avec notre époque : la radicalisation.
Quel film vous a le plus aidé à préparer celui-ci ?
Quand on était à Metz, dans l’est de la France, pour tourner le film, on n’avait qu’un seul livre et il portait sur James Gray. C’est le cinéma classique par excellence. Et en termes de mise en scène, c’est un grand maître. Ce qui nous a touché le plus est qu’il faisait partie du jury à la Mostra de Venise [où le film était présenté en compétition]. Il nous a envoyé un texto pour nous féliciter et ça, c’est peut-être plus important pour nous que le prix.
Quel film mettant en scène une relation père-fils vous a le plus touché ?
Le premier qui me vient en tête est L’horloger de Saint-Paul avec Philippe Noiret. Comme dans notre film, il y a un rapport au politique. D’ailleurs, un des personnages de Jouer avec le feu est nommé Descombes, en hommage au film de Bertrand Tavernier.
Quels sont les films à propos de l’extrême-droite qui vous paraissent les plus éclairants ?
American History X est fantastique sur le sujet. Mais c’est un film très, très violent. On ne voulait pas montrer la violence. On souhaitait en parler de manière stylée. Il y a aussi This is England, un film que j’adore. Là, c’est un pré-ado qui se fait prendre dans un groupuscule. On a enquêté sur ce qui faisait que des gens finissent par appartenir à ces cellules violentes. Très souvent, ce sont trois facteurs en même temps : un contexte familial qui disjoncte, une humiliation et un groupe qui arrive en sauveur. On s’en est servi dans notre film et on le voit dans This is England de manière très explicite. La dialectique entre l’individu et le groupe nous intéresse beaucoup. Nos trois films sont là-dessus.
Quelle performance de Vincent Lindon vous a le plus marqué ?
Les films de Stéphane Brizé, indéniablement. C’est du cinéma-vérité. On y croit à chaque seconde. Il est bouleversant et il est complètement habité par son personnage. Si j’avais à en choisir un, je dirais La loi du marché.
Si vous aviez à retenir une performance de Benjamin Voisin, quelle serait-elle ?
J’hésite. Je l’ai découvert dans Été 85 de François Ozon et j’ai été stupéfaite par son charisme. Ça ne m’arrive pas souvent. Mais après, dans Illusions perdues de Xavier Gianolli, il est central. Et on voit toute sa palette de jeu. [...] Benjamin, c’est un Belmondo, un Delon. Il a beaucoup d’imagination. Il peut tout faire. Il est physique, il peut inquiéter, il peut être séduisant, il peut être drôle. C’est un acteur né.
Quel film qui parle ou interroge la notion de masculinité recommanderiez-vous ?
Je ne sais pas si ça se fait de se citer soi-même, mais Voir du pays est là-dessus. C’est sur des filles militaires qui rentrent de la guerre. On ne parle pas tant des militaires que de la société entière. On dit que oui, l’égalité homme-femme a eu lieu, mais ce n’est pas si simple. Si en face de vous, vous avez des hommes qui considèrent que le masculin l’emporte sur le féminin et que les valeurs virilistes sont meilleures que les autres, toute la pédagogie est à recommencer.
Si vous aviez le pouvoir de convoquer quelqu’un, mort ou vivant, pour faire un film, de qui s’agirait-il ?
Je dois admettre que le casting de La chambre d’à côté, le dernier Almodóvar, me fait pas mal rêver !