Patrick Boivin donne au jeune Isak Guinard Butt son premier rôle au cinéma dans Écho à Delta, en salle dès le 1er mars.
Croyez-vous aux extraterrestres?
Non (rire). En fait, oui, mais pas en visite chez nous… Ce qui est drôle, c'est qu’adolescent, j'ai commencé à faire de la bande dessinée. Puis une des choses qui a été ma première source d'inspiration, ça a été l'ufologue Richard Glenn avec tout son délire. À l’époque, avec des amis, on allait voir ses conférences riches de fantaisies, puis on dessinait le monde. On trippait! (rire)
Ceux qui sont familiers avec votre travail depuis le collectif Phylactère Cola jusqu’à vos courts métrages en stop motion, connaissent votre passion pour les trucs bricolés. Était-ce important que ce soit intégré dans le film?
Pour ce film, oui. On avait besoin de cette magie-là pour sentir un peu le délire dans lequel part le jeune Étienne. Je ne pense pas qu'on aurait pu raconter cette histoire-là sans ce bagage qui me permet de le faire. Autrement, nous n’aurions pas eu les moyens, parce que ces effets coûtent cher.
Sans carburer à la nostalgie des années 80, Écho à Delta se situe quelque part entre le cinéma de Steven Spielberg (E.T.), Joe Dante (Explorers) et les Contes pour tous…
Explorers, totalement! (rire) C’est le meilleur exemple, quand les kids commencent à construire leur navette. J’avais ce film en tête pendant le projet. Et oui, les Contes pour tous nous ont influencés… Opération beurre de pinottes, puis La guerre des tuques dans une certaine mesure; c’était un des rares films québécois où des jeunes parlent comme des jeunes. Cet aspect était important pour moi.
Il y a aussi la musique, qui n’est pas sans rappeler le thérémine de la série Star Trek, ou encore les Ondes Martenot employées par Jerry Goldsmith dans Ghostbusters.
Tout à fait! Alexis Le May et Michèle Motard, qui signent la musique, sont des amis. Je connais bien leur travail. Michèle essaie plein d’instruments. Elle a commencé à jouer de l’égoïne il y a quelques années. Mon grand-père en jouait aussi. Donc, oui, il y a cette sonorité qui donne un aspect “science-fiction”, mais à la base, ce sont principalement des circonstances qui ont mené vers ces sonorités.
Au-delà des références à la science-fiction, le film aborde, avant tout, le sujet délicat de la disparition d’un être cher en s’adressant à un jeune public.
Je suis père de deux enfants. Ça fait des années que je vois ce qui les intéresse. Comme parent, quand je les accompagne au cinéma, je n’ai pas envie de m’emmerder. Donc, le parti pris que nous avions, c'était d'aller vers un film qui allait plaire aux enfants et aux adultes, mais pour des raisons différentes.
Le récit mise sur le ressenti et l’intériorité des personnages. Il y a cette volonté de ne rien souligner au marqueur. Pourquoi?
Parce que c'est le genre de cinéma qui me plaît. J’ai eu la chance de travailler avec un scénariste et des producteurs qui étaient game d’aller au bout du pari voulant que les enfants soient capables de comprendre le sous-texte, les non-dits. Ils n’ont pas besoin d’avoir tout cuit dans le bec. Ils sont brillants. Je pense qu’ils aiment découvrir, et préfèrent se faire demander « 2+2 » que de se fait dire « 4 ».
Il y a deux scènes en particulier, où des adultes sont en conflit, mais ces événements se manifestent en sourdine...
C'est ce que je crois que les jeunes vivent. C'est le souvenir que j'en ai… Je n'ai pas de souvenir de disputes entre mes parents. Mais j'ai des souvenirs de conflits entre adultes où c'était juste du bruit et de l'agression, mais les mots, tu ne les comprends pas. C’est le point de vue du jeune dans le film.
Était-ce la première fois que vous aviez à diriger de jeunes comédiens?
Non. J’en ai fait beaucoup. Entre autres avec mes enfants. J'étais donc en confiance, même si je me suis énormément préparé. Malgré un tournage dans des circonstances difficiles [pandémie, manque de personnel], nous avons quand même pu faire des ateliers de jeu avec eux. Isak [Guinard Butt] avait tout ce qu'il fallait, sauf l'expérience. Nous avons travaillé fort avec lui et je suis vraiment content du résultat. Il n'a jamais lâché et nous a donné que de grosses performances.
Chez les adultes, on retrouve l’acteur Martin Dubreuil, avec qui vous aviez collaboré sur votre précédent long métrage, Bunker. Il ne serait pas difficile de croire que son personnage dans Écho à Delta a été écrit sur mesure.
Oui, ça fait longtemps que c'est lui. J’ai fait quelques projets avec lui, il est comme un incontournable pour moi. Le personnage de l’homme de la cour à scrap est arrivé plus tard dans l’écriture, mais c’était clair que ça allait être Martin Dubreuil.
Photos : Filmoption International