
Tourné dans une résidence pour aînés de Montréal, le documentaire Le Château est offert dès aujourd’hui en primeur et en exclusivité sur Illico....
Le Château est dédié à votre mère, pouvez-vous nous en dire plus sur l’aspect extrêmement intime et émotionnel du film?
J’avais déjà filmé ma maman. Mais c'est sûr que sa perte d'autonomie me touchait beaucoup. Faire le film que personne d’autre ne pourrait faire aussi, c’est un peu ma devise.
Selon moi, les personnes âgées peuvent nous apprendre sur nous-mêmes, notre histoire. Elles détiennent la mémoire, font le lien entre les générations. Cette transmission de la mémoire - mais aussi comment on peut la perdre - est un sujet qui m'intéresse.
Quels étaient les enjeux particuliers que vous avez rencontrés lors de ce projet-là?
Il fallait trouver une façon délicate de filmer les personnes âgées. Elles peuvent avoir peur de l’âgisme, ou qu’on soit là pour « filmer du vieux ».
J’applique une approche enseignée par mon mentor à l’ONF, Pierre Perreault. Côtoyer les personnes sans caméra, habiter avec les gens. Ensuite, ils t’ouvrent leurs portes. Sans le savoir, ma recherche a duré trois ans environ et le tournage a connu la même durée.
Dans le film, votre caméra s’attarde longtemps sur les visages des aînés, nous montrant des images absentes de l’espace public. Quel était votre objectif?
Dès le début, j’avais cette volonté de filmer au plus près la vieillesse, les visages, ce que c’est que le temps, le temps de vivre. Le temps peut être long, vous savez, quand on est enfermés dans cet espace-là.
Certains plans montrent les façades des résidences bétonnées vues de l’extérieur, comme pour signifier la solitude des aînés.
Effectivement. C’était mon sentiment. Je voulais capter cette solitude, ces cages… Chacun sa cage, chacun sa fenêtre, chacun sa télé. Les gens ne veulent pas rentrer à l’intérieur, ça m’a beaucoup frappé : les enfants passent chercher leurs parents mais ils y entrent rarement.
Pourtant, il y a de la vie là-dedans! Une vie sociale, un monde. Mais on dirait que quand on recule, on ne le voit pas.
Quel regard portez-vous sur la situation que traverse le Québec en ce moment avec le COVID-19?
On ne pouvait pas voir venir une telle catastrophe humanitaire et planétaire. Mais l’enfermement des personnes âgées et le «ghetto de la vieillesse», je les ai vus bien avant le virus.
Maintenant les personnes âgées sont encore plus ostracisées et isolées. Il y en a de très autonomes dans certaines résidences, qui ne peuvent plus sortir. Et d'autres qui en sont sorties et qui ne peuvent plus y entrer!
Selon vous, pourquoi le sort des aînés n’est pas un enjeu central de la société?
C’est une bonne question. Ça l’est pour moi. Mais je crois que la télévision détermine l’imaginaire et la représentation des personnes âgées s'y fait rare. Les aînés sont également invisibles sur les médias sociaux.
Le monde fait la publicité de la jeunesse, de la fraîcheur. Au cinéma, il y a un décalage avec il y a 50 ans où sortait le grand classique québécois Pour la suite du monde où les vieux tenaient la vedette.
Quel message aimeriez-vous passer aux spectateurs qui vont regarder Le château?
De ne pas attendre que leurs proches âgés soient en perte d’autonomie pour aller les aider, les appeler. Il faut commencer avec sa propre famille et changer notre façon de voir les choses : comprendre tout ce que ces personnes peuvent nous apprendre, et pas combien elles vont nous coûter.
D’autant qu’on va tous vieillir, et qu’il y a donc une personne âgée en chacun de nous…
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Offert pour l'instant en exclusivité sur Illico, Le château sera disponible sur d'autres plateformes à compter du 19 mai prochain.
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