Turq. 2002. Drame psychologique de Nuri Bilge Ceylan avec Muzaffer Ozdemir, Mehmet Emin Toprak, Zuhal Gencer Erkaya. Espérant trouver du travail à Istanbul, un chômeur quitte sa campagne et débarque chez son cousin, un photographe désabusé et peu accueillant. Autopsie froide et implacable du mal de vivre de deux solitaires. Climat morose. Dialogues réduits au minimum. Mise en scène à la fois austère et poétique. Jeu d'une belle sobriété.
Espérant trouver du travail à Istanbul, un chômeur quitte sa campagne et débarque chez son cousin, un photographe désabusé et peu accueillant. Autopsie froide et implacable du mal de vivre de deux solitaires. Climat morose. Dialogues réduits au minimum. Mise en scène à la fois austère et poétique. Jeu d'une belle sobriété.
En seulement trois longs métrages, Nuri Bilge Ceylan a déjà posé les jalons d'une oeuvre singulière, artisanale, difficile à cataloguer, portant la marque d'une constellation de cinéastes-poètes au regard à la fois personnel et universel qui compterait, entre autres, Tarkovski, Angelopoulos, Erice, Antonioni et Ozu. Jouissant d'une liberté totale sur ses tournages, l'auteur n'obéit donc à aucun diktat commercial. Ainsi, UZAK, oeuvre de maturité, ne traite pas de grands sujets, comporte un semblant d'intrigue, mais véhicule néanmoins une authenticité quasi autobiographique. En dépit d'un rythme fort lent, l'intérêt est maintenu grâce à une mise en scène austère et poétique qui, à coups de détails significatifs et de très rares dialogues, expose progressivement, avec une certaine froideur et une rigueur manifeste, la non-viabilité d'une relation entre deux solitudes. Il s'en dégage forcément un climat morose et désenchanté, malgré quelques touches d'humour subtiles et bienvenues. Les deux acteurs, des proches du réalisateur, livrent une prestation d'une rare sobriété, où tout se joue dans les petits gestes, les regards et les non-dits. La somme de toutes ces parties permet virtuellement à Ceylan de «filmer l'infilmable», soit l'insondable passage de la vie.
Texte : Jean Beaulieu