Une auteure de romans à l'eau de rose traverse une crise existentielle. Portrait sincère d'une héroïne atypique. Humour discret mais corrosif. Mise en scène colorée. Jeu intense de M. Paredes.
Certains risquent de qualifier le nouveau cru de Pedro Almodovar d'assez fade. Le délire visuel s'est effectivement fortement assagi, même si l'auteur reste fidèle à ses compositions picturales aux couleurs vives et aux effets kitch qu'il en retire. La provocation outrancière semble également disparue de l'écran; et pourtant, à bien y regarder, cette histoire sentimentale se démarque nettement des canons en vogue au cinéma. D'abord, le cinéaste reste fidèle aux héroïnes féminines atypiques, dont les difficultés d'ordre amoureux ou professionnel sont évoquées ici avec un humour discret mais corrosif qui n'altère aucunement la sincérité du portrait. De plus, la lecture au second degré s'avère constante. Les petites phrases égratignant l'ordre social fusent régulièrement et sont souvent prononcées par des personnages inattendus. Autour du drame individuel gravite donc une satire bien plus générale de l'Espagne urbaine. La mince distinction entre les artifices du soap-opéra présenté en introduction et les rouages du réel décrits ajoute un élément formel d'une intéressante ambiguïté. Marisa Paredes excelle dans le rôle principal.
Texte : Christian Depoorter