L’acteur et réalisateur partage son goût pour les conflits armés intimistes dans Une affaire d’honneur, sur nos écrans le 26 janvier.
L’orgueil blessé des militaires français sous une IIIe République vaincue, incarnée par un bataillon de figures masculines. L’éveil d’une pensée féministe, incarnée par un personnage historique, Marie-Rose Altier de Valsayre. Tels sont (entre autres) les forces en présence (et en opposition) dans le nouveau long métrage écrit et réalisé par Vincent Perez, Une affaire d’honneur, en salle au Québec le 26 janvier.
Entretien à Paris avec celui qui a joué le rival de Depardieu dans Cyrano de Bergerac et l’amant de Deneuve dans Indochine.
Est-ce que l’honneur est une notion d’actualité?
Oui et je pense qu’on devrait s’en réclamer plus souvent. Je vois l’honneur comme une forme de dignité humaine, un esprit qui s’élève au-dessus de la masse. Il y a dans l’honneur quelque chose de grand et de beau, qui me plaît. [...] Je pense que si les gens sur les réseaux sociaux devaient assumer jusqu’à l’épée ce qu’ils écrivent par-delà l’écran et souvent sous couvert de l'anonymat, le monde irait mieux.
Qu’est-ce qui vous fascine dans l’art du duel, qui est au cœur de votre film?
J’ai tourné beaucoup de duels au cinéma en tant qu’acteur et travaillé avec le plus grand maître d’armes. Je voulais faire quelque chose de cette expérience-là. Je me suis mis à faire des recherches et suis tombé sur cette période assez fascinante de l’histoire française, une période de changement, de mutation: l’arrivée de l’électricité, les prémices du féminisme, etc. J’ai vu dans ce monde beaucoup de similarités et de résonances avec le monde d’aujourd’hui.
Quelle était la fonction des duels auxquels se livrent les personnages de votre film?
À résoudre des désaccords. Le vainqueur a raison, le perdant a tort, la situation est acceptée. L’idée de la vengeance n’entre pas dans les codes du duel de l’époque. Dans la philosophie des duellistes, à la fin c’est fini, c’est réglé.
Le cinéma nous présente souvent les duels, non comme un événement qui survient dans le courant du récit, mais comme son issue fatale.
Effectivement. Le défi pour moi consistait à faire que le film continue au-delà du duel [le film en compte trois ou quatre]. C’est une autre typologie du duel, une autre mythologie, que j’ai voulu mettre de l’avant. On ne va pas du côté de Sergio Leone mais plutôt vers l’art du duel, la beauté du combat.
Était-ce un défi pour vous de jouer le vilain de l'histoire, soit le capitaine qui va à l’encontre des valeurs [la justice universelle, les droits des femmes] que le film défend?
Il incarne le sujet qui concerne tous les personnages du film: la guerre, l’humiliante défaite, le monde d’avant. Le patriarcat, l’armée. C’était un personnage très jouissif. Tout ce que je contenais en tant que réalisateur du film, je pouvais le lâcher devant la caméra. L’un servait l’autre.
Avez-vous avec ce film l’ambition de rejoindre le plus grand nombre?
L’immense succès du film de Justine Triet, Anatomie d’une chute, est un très bon contre-exemple de cette idée qu’on peut se faire d’un film populaire. Sur papier, on doute qu’il va s’adresser au plus grand nombre. Vous avez vu le résultat? Je pense qu’à partir du moment où on parle de quelque chose d’intime et de profond, il y a une universalité qui entre en jeu. La clé du succès, à mon avis, réside dans la sincérité.
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