L’AVIS DE MEDIAFILM

Philippe Falardeau (MONSIEUR LAZHAR) a éprouvé un coup de foudre à la lecture du roman autobiographique de Joanna Smith Rakoff, dont il offre ici une adaptation à la fois fidèle, dans son essence, et libre, dans sa manière et son déroulement. Ainsi, il a décloisonné le monologue intérieur, qui forme l'essentiel du récit original, sans renoncer à faire entendre la voix de la narratrice, interprétée avec ce qu'il faut de naïveté et d'autorité par la star montante Margaret Qualley. Tout n'est pas parfait, cela dit. Des dialogues sentent le fabriqué et le personnage de Sigourney Weaver, plastiquement surconstruit, met un temps considérable à s'incarner. Aussi, les employés de l'agence ne sont pas assez développés pour l'avant-plan, trop pour l'arrière, causant une sorte d'entre-deux malaisant. En revanche, la direction artistique phénoménale maquille à s'y méprendre Montréal en New York, avec la complicité de la directrice-photo Sara Mishara, sublimement inspirée et inventive sous la direction assurée de Falardeau. Le décor de l'agence feutrée et lambrissée, enténébrée par les volutes de cigarettes, complète la magie, jamais prodigieuse mais toujours efficace, d'un vrai "film d'époque contemporain". (Texte rédigé en février 2020, dans le cadre du 70e Festival du film de Berlin)

Texte : Martin Bilodeau